En prélude au Forum sur la Coopération sino-africaine (Focac) auquel il est attendu, le Président de la République SEM Faure Essozimna Gnassingbé s’est prononcé sur les relations d’amitié et de coopération sino-togolaise et leurs perspectives d’avenir. C’était dans un entretien qu’il a accordé à China Global Television Network (CGTN) anciennement CCTV News.
CGNT : Excellence Monsieur le Président, je vous remercie d’avoir accepté notre interview. L’aéroport International Gnassingbé Eyadema de Lomé a été mis en service depuis deux ans, quels sont les impacts de cette infrastructure sur la vie de la population togolaise ? En outre, a-t-elle donné une impulsion aux échanges commerciaux entre le Togo et la Chine ?
SEM Faure Essozimna Gnassingbé : Je vous remercie d’avoir bien voulu nous interviewer et de commencer par un sujet qui fait un peu la fierté des Togolais, puisque les Togolais sont fiers de cet aéroport. Je voudrais avant tout, saluer la qualité de la construction de cet aéroport. Je crois que c’est un bel aéroport, c’est un aéroport qui est efficace, qui est sûr et qui garantit toutes les formes de sécurité qui sont importantes aujourd’hui. C’est un aéroport qui a aussi une vocation régionale, si vous regardez autour de nous, c’est probablement un des plus modernes aujourd’hui dans la sous-région et qui a un impact direct sur la vie des Togolais.
Je peux dire que ceux qui en bénéficient le plus, ce sont essentiellement les voyageurs et ceux qui y travaillent. Est-ce que ça a donné une impulsion aux échanges entre la Chine et notre pays ? Je peux dire que c’est quelque chose qui évolue beaucoup.
Les échanges commerciaux entre la Chine et le Togo n’ont pas cessé de progresser et ils continueront. Mais si vous me demandez de savoir quand est ce qu’il y aura une ligne entre Lomé et la Chine, je peux vous dire que dans quelques années, ce sera une réalité.
CGNT : La Chine et le Togo ont établi des relations diplomatiques depuis plus de quatre décennies. Quel regard portez-vous sur le développement des relations entre nos deux pays au cours de ces dernières années et sur la coopération entre nos deux pays dans le futur ?
SEM Faure Essozimna Gnassingbé : Les relations entre la Chine et le Togo, vous l’avez dit, datent de 4 décennies. Il y a des choses et des constantes qui ne changent pas. C’est la fidélité dans l’amitié, c’est la confiance réciproque et c’est une entente sur les grandes questions qui concernent ce monde. Ça n’a pas changé. Ce qui a changé, je peux dire que c’est pour le meilleur, notamment dans le domaine économique. Elle a beaucoup changé en quantité, c’est-à-dire que c’est une relation qui est plus vigoureuse.
Les montants en jeu sont beaucoup plus importants et donc se sont adaptés aussi à la nature de nos besoins. Au fur et à mesure que la Chine a eu des moyens plus importants, elle a accru également l’aide qu’elle apporte à la coopération qui existe entre elle et les pays d’Afrique en général, et le Togo en particulier.
Et puis récemment, ce qui me plaît dans l’évolution de nos relations, je vois qu’elle est de plus en plus axée sur les échanges entre les jeunes. Beaucoup de jeunes Togolais ont la possibilité d’aller en Chine soit pour se former, soit pour observer ou apprendre un peu des expériences qu’il y a dans votre pays.
CGNT : Quels types d’entreprises chinoises voulez-vous encore introduire au Togo ? Les investissements des entreprises chinoises ont-ils aidé le Togo dans son développement durable ?
SEM Faure Essozimna Gnassingbé : Les investissements ont aidé le Togo dans sa croissance et dans son développement. Mais vous savez que le développement, c’est un chemin qui ne s’arrête pas. Le progrès n’a pas de limite, pour l’instant. Il y a eu des progrès certes, mais on peut faire mieux.
Nous savons qu’il y a des dizaines de millions d’emplois en Chine qui sont prêts à être délocalisés. Donc toutes les entreprises en Chine qui sont prêtes à être délocalisées sont toujours les bienvenues. Si vous demandez les secteurs dans lesquels nous avons besoin des investissements, je vous dirai naturellement le secteur agricole parce que c’est le plus important de notre économie.
Notre agriculture a besoin d’être modernisée et industrialisée, c’est ce qu’on appelle l’agro-industrie. Je dirai que dans ce secteur-là, nous avons besoin des entreprises chinoises. Comme vous le savez, le Togo, à l’instar d’autres pays africains, est un pays où il y a beaucoup de jeunes et aujourd’hui la jeunesse, sa première priorité, c’est l’emploi. Nous ferons tout pour attirer ces emplois-là.
CGNT : En septembre prochain, le sommet du forum sur la coopération sino-africaine se tiendra à Beijing. Vous allez y participer et y rencontrer le Président chinois Xi Jinping. Qu’attendez-vous de cette rencontre et quel impact pensez-vous que ce sommet aura sur les relations sino-africaines ?
SEM Faure Essozimna Gnassingbé : Je pense que ça va être un sommet important. Parce que quand nous regardons le monde aujourd’hui, il a évolué. Lorsque nous regardons le comportement de certaines puissances, ce comportement a changé. Le monde est devenu beaucoup plus imprévisible aujourd’hui. Je pense que pour de vieux partenaires, alliés et amis comme l’Afrique et la Chine, nous avons besoin de maintenir la stabilité.
Nous avons également besoin de confronter un peu nos points de vue sur les développements politiques et diplomatiques que nous voyons dans le monde. Il y a une tentation de la part de certaines puissances de faire des choses seules. Alors que nous, ce qui est la base de la relation entre l’Afrique et la Chine, c’est la concertation, et le souci d’avoir une coopération comme on dit, gagnant-gagnant.
La Chine y trouve son intérêt et les Africains également. Donc face à ce que l’on voit dans le monde, le terrorisme, les changements climatiques, je voudrais que nous puissions en parler avec le Président Xi Jinping, parce que je sais que son souci, comme le nôtre, est de préserver la paix, partout où elle est possible, la rétablir là où elle est menacée et set surtout promouvoir le multilatéralisme. Ça c’est sur les plans politique et diplomatique.
Sur le plan économique, nous pensons que nous allons pouvoir parler du grand projet chinois que je salue, la « Une ceinture, une route », et voir quelle place l’Afrique peut occuper dans ce grand projet, qui est ambitieux, généreux, et à mon avis, révolutionnaire. Parce que c’est rare de voir un pays, même si la Chine est aujourd’hui la deuxième puissance économique mondiale, entreprendre un projet d’une telle ampleur qui embrasse pratiquement tous les continents.
CGNT : Le prochain sommet porte sur l’initiative «ceinture et route» et s’engage à renforcer la communauté de destin entre la Chine et l’Afrique. Quelles opportunités l’initiative «ceinture et route» peut-elle apporter à la coopération sino-africaine et comment constatez-vous la communauté du destin commun pour l’humanité, l’idée proposée par le Président chinois Xi Jinping ?
SEM Faure Essozimna Gnassingbé : D’abord je salue cette idée et je fais le lien entre les deux. Parce que quand vous observez la mondialisation aujourd’hui, le vrai problème est l’accroissement des inégalités. Les riches sont de plus en plus riches et les pauvres sont de plus en plus pauvres.
Et quand il y a de telles inégalités, de telles différences, comment peut-on parler de communauté de destin ? C’est pour ça que je salue «une ceinture, une route». Il s’agit de créer les conditions pour que les plus défavorisés puissent aussi avoir accès à une forme de prospérité et puissent sortir de l’état de pauvreté qui est le leur. J’ai aussi récemment lu le livre du Président Xi Jinping sur la manière de combattre la pauvreté. Donc je vois que c’est un souci que nous partageons ensemble. Si le monde tel qu’il fonctionne aujourd’hui doit continuer ainsi, on ne pourra pas parler de communauté de destin.
Mais la communauté de destin ne peut pas être seulement un slogan. C’est d’abord l’action. Et je crois que cette action, c’est le projet «une ceinture, une route». Donc, moi je fais le lien entre l’idée d’une communauté de destin et le projet «une ceinture, une route».
Maintenant, mon souhait, comme je l’ai dit tantôt, est que l’Afrique, qui est un continent d’avenir, puisse profiter et mériter la part qu’on lui attribuera dans ce grand projet. Notre première ambition, c’est de faire taire les armes sur le continent africain. Donc c’est la paix. Et s’il y a la paix, le reste est permis.